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RAIL

La data, une ressource à exploiter…

FRÉDÉRIC BURGUIERE, LE 11 JUIN 2025
\ PUBLIÉ DANS BTP RAIL N° 57
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La data, une ressource à exploiter…
©Railwai
Quel que soit le sujet, la collecte des données sur le terrain offre de nombreux avantages. Toutefois, face à la multitude de solutions, se pose la question de leur partage et de la standardisation de certains modèles. Constat avec Jean-Michel Estibals et Olivier Mari de Railwai. 

Aujourd’hui, la digitalisation du ferroviaire est en marche, et pour obtenir et analyser des données pour la maintenance des engins de travaux comme sur celle de l’infrastructure du réseau (voie, caténaire végétation, etc.) les solutions se multiplient. Un besoin d’analyse qui en l’espace de 10 ans est passé d’un manque de données important à un surplus de celle-ci. « Il y a quelques années, Google estimait que 80 % de la donnée disponible dans le monde a été créée au cours des 24 derniers mois. Donc nous sommes vraiment sur un élément exponentiel » indique Jean-Michel Estibals, Président et cofondateur de Railwai. Une évolution qui a logiquement suivi l’explosion des éléments IoT, qui jouent un rôle clé dans la collecte et l’analyse des informations. Toutefois, cette collecte massive est encore peu ou mal exploitée, puisque près de 85 % des données ne sont pas traitées : « Chez Railwai, nous considérons que moins de 15 % de la donnée dont disposent nos clients est réellement utilisée » poursuit Jean-Michel Estibals. Un comble à l’heure de l’IA et du Big Data, qui offrent la possibilité d’avoir une vision globale et d’analyser ces dernières sous un angle micro et non macro. « Aujourd’hui, nous avons la capacité de calcul, la puissance algorithmique pour traiter l’ensemble des données collectées ». 

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Acculturer l’industrie à la data 
Dans ces conditions comment expliquer, cette déperdition ? Pour Jean-Michel Estibals, la réponse est à chercher dans une culture de la data qui n’est pas innée de manière générale dans le secteur industriel, y compris dans le ferroviaire.  « Dans de nombreux domaines industriels, beaucoup de données sont disponibles, mais les personnes en charge de leur gestion ne savent pas vraiment quoi en faire ». Ainsi, bien que les opérateurs disposent d’interface remontant les données, la valeur ajoutée de la capacité d’analyse en termes prédictifs de ces derniers reste faible : « Les fabricants de capteur viennent du domaine industriel et non du domaine de la data en termes d’exploitation, de modification, d’éléments prédictifs… ». Plus spécifiquement dans le ferroviaire, de plus en plus de wagons d’enregistrements sont déployés sur le réseau afin de collecter des informations sur l’état du patrimoine. Une collecte qui engendre des gigas de données qui doivent être ensuite analysés et stockés. Une approche qui est certes, plus sécurisante pour les opérationnels sur le terrain, mais qui pose question quant à sa fiabilité. Si la mise en place d’outils et de modèles d’apprentissage permettant de reconnaître certaines anomalies va dans ce sens, beaucoup d’éléments sont encore mal détectés. « Ces systèmes de détection en sont encore à leurs balbutiements. Dans certains cas, un problème est annoncé alors qu’il n’existe pas ». De fait, entre un temps de traitement des données extrêmement long et des modèles qui ne sont pas encore d’une très grande fiabilité, les campagnes d’enregistrements numérique (géométrie, environnement…) sont conservées dans leur intégralité pour une durée d’environ 5 ans. 

La FIF mène une étude sur la donnée 
À l’heure de la digitalisation et de l’arrivée de l’IA, la Fédération des Industries Ferroviaire (FIF) a lancé dernièrement une étude afin de travailler le sujet du partage de la donnée. « À l’échelle de la filière, nous souhaitons fluidifier le partage de la donnée en créant des conditions de confiance basée sur un cadrage technique, juridique et contractuel équilibré entre les différents acteurs de filière ferroviaire française » explique Jean-Jacques Mogoro, Directeur du Pôle Industrie. Le but de cette opération étant de bâtir de manière collégiale l’ensemble de la chaîne de valeur et de travailler des conditions qui permettent de passer d’un mode en silo à un mode de partage collaboratif.

La Suède en exemple 
Basée sur la Suède, l’étude a révélé que 80 % des données concernaient la circulation et que 20 % portaient sur le partage entre fournisseur, fabricant et opérateur. « Ce sont ces 20 % qui nous intéressent. Quel est l’intérêt et pourquoi ont-ils vu un intérêt à les partager ? ». Autre sujet d’actualité, l’IA et son impact dans la chaîne de valeur. « Le vrai enjeu, est de contextualiser la donnée et travailler des process pour créer une nouvelle chaîne de valeur ». Rendez-vous au Sifer pour découvrir le résultat de cette étude. 

Vers des modèles standardisés 
Pour améliorer la situation, l’une des solutions se situerait au niveau de la détection, en déployant des modèles conceptuels de données standardisés. « Cibler un enregistrement, permettrait de segmenter les archivages et de bien cibler ce que l’on souhaite garder au niveau des données ». Le déploiement de ce type de système conceptuel, permettrait d’améliorer le degré de détection au niveau de l’environnement propre aux types de capteurs mis en œuvre. « En généralisant l’usage de modèles conceptuels standardisés, sans se limiter à une source particulière de capteurs, nous pourrons concevoir des outils d’analyse qui identifieront de mieux en mieux les problématiques ». Une troisième piste d’amélioration porte sur la localisation de la machine et des détections pour assurer un suivi des évolutions dans le temps. « En lieu et place de l’archivage complet des données d’une ligne, l’historisation ciblée permettrait de retenir uniquement les zones présentant des problèmes. Cela induirait une baisse notable du volume de données, en mettant l’accent sur les parties de l’infrastructure nécessitant une attention particulière ». 

Un partage des données difficile 
Industrialiser ce type de solution permettait ainsi aux différents acteurs de parler le même langage. Un concept qui se heurte à des standards mal définis au niveau européen, en raison d’un manque d’entente entre les différentes entités, et ce, malgré de nombreuses initiatives (GAIA-X, Shift2Rail) « Dans le ferroviaire on ne partage pas forcément ses données. De fait, ces initiatives ont du mal à prendre ». Une situation qui limite ainsi la capacité des entreprises à créer des modèles plus performants et qui évince un potentiel énorme dont pourraient profiter les différents acteurs. À cette problématique, s’ajoute celle liée au travail d’analyse qui suit actuellement une logique en silo : « Nous savons depuis longtemps que la donnée a de la valeur lorsqu’elle est croisée. Ainsi, en associant des éléments portant sur le ballast, la géométrie de la voie, la configuration de la caténaire, à des informations sur un ouvrage d’art ou des événements météorologiques, il devient possible de créer une valeur ajoutée considérable » indique Olivier Mari, Directeur des opérations. Si la demande auprès d’une entreprise comme Railwai porte notamment sur l’accès à des données facilement exploitables et labellisées, industrialiser les process s’avère des plus complexes : « Pour des raisons de sécurité, qui s’entendent complètement, certaines entreprises sont réticentes à l’idée de partager les données. Par ailleurs dans certains cas, les fabricants de capteur transmettent tout ou partie des données, ce qui nous oblige à industrialiser le processus avec ces derniers » poursuit Olivier Mari. 
 
Des besoins simples 

Aussi étonnant soit-il, à l’heure où l’IA émerge et qu’une enveloppe de 109 Md€ a été annoncé mi-février à l’occasion du sommet international de l’intelligence artificielle de Paris, les demandes et besoins en data peuvent être somme toute basiques « Celles-ci peuvent concerner la mise en œuvre d’un « Data Warehouse » modèle qui a été inventé il y a 20 ans, ou la possibilité de comparer deux campagnes » poursuit Jean-Michel Estibals. SI aujourd’hui les données sont vues sous le spectre de la data science, l’arrivée de l’IA, qu’elle soit générative ou de processus, offre un gain de productivité en automatisant certaines tâches manuelles permettant ainsi d’apporter plus de valeur ajoutée à l’intelligence humaine. « Nous proposons à nos clients, une interface d’aide à la décision et d’aide au pilotage de leur maintenance. L’humain reste encore celui qui va prendre la décision, et qui a cette capacité d’analyse » explique Jean-Michel Estibals. 
 
Du chemin à parcourir 

SI le chemin à parcourir semble encore long entre les demandes et les possibilités qu’offre la technologie, entre la capacité d’analyse et les puissances de calcul, tous les ingrédients de la réussite sont déjà là. Toutefois, une prise de conscience est nécessaire pour tout mettre en place. « Je pense que d’ici trois ans, tous les acteurs auront compris qu’ils peuvent faire beaucoup avec ce qu’ils ont déjà. En revanche, pour ce qui est de la capacité d’avoir des gains de productivité importants, je pense qu’il faudra encore sept ou huit ans » conclut Jean-Michel Estibals. 

Texte Frédéric Burguière


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