Deux mois d’arrêt en France consécutifs au premier confinement, et un mois de pause à l’international, auront sabré le 1er semestre 2020 d’Eiffage qui s’achève sur un recul de – 19 %. « Le second semestre est somme toute satisfaisant, commente Benoît de Ruffray, PDG du groupe Eiffage. Les chantiers ont su rapidement redémarrer, les concessions ne se sont jamais arrêtées, et malgré le gel des décisions, peu surprenant en période électorale, nos clients ont continué leurs investissements. Les grands projets ont quant à eux porté l’activité à l’international ». Il faut avouer que le Groupe fut prolifique. 2020 aura vu l’obtention de contrats majeurs dont la rénovation du siège social de Peugeot à Paris, l’ordre de service de la phase travaux de HS2, la construction de l’hôpital Paris Saclay et du siège de RTBF à Bruxelles, ou encore la réalisation de 7 km d’autoroute en Norvège. « Certains domaines sont particulièrement actifs, à l’instar de la rénovation, des énergies renouvelables, de la santé ou des transports, et garantissent une activité riche », ajoute le dirigeant.
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Une perte de 1,4 milliard d’euros
Dans les détails, le CA 2020 du groupe Eiffage s’établit à plus de 16,3 milliards d’euros. Un chiffre honorable au vu des bouleversements économiques et sanitaires. « D’ailleurs, l’exercice se rééquilibre en fin d’année grâce à une remontée de l’activité qui s’achève sur une légère baisse de 1,9 % au quatrième trimestre », précise Benoît de Ruffray. Dans les Travaux, l’activité atteint plus de 13,7 milliards d’euros, en baisse de 9,5 % sur un an. L’amélioration est, là encore, notable au second semestre où les différentes branches Travaux retrouvent le même niveau d’activité qu’en 2019 en France (+ 0,1 %) et n’enregistrent qu’une légère baisse de 1,4 % au global. « Au final, l’impact de la pandémie représente une perte de 1,4 milliard d’euros », livre le dirigeant. Le résultat net s’affiche à 375 M€, soit un peu plus de la moitié qu’en 2019. La vraie bonne nouvelle réside dans le carnet de commandes, évalué à 16,2 milliards d’euros fin 2020, en progression de 14 %. Soit plus de 14 mois d’activité. « Nous y incluons 1,4 milliard de travaux non réalisés au 1er semestre, et 600 M€ qui sont le produit des affaires finalisées », complète-t-il.

Le Génie Civil, moteur de la reprise
Dans la branche Construction, l’activité est en baisse de - 13,4 % à 3,69 milliards d’euros, moins sensiblement en France (- 12,6 %) qu’en Europe (- 16,1 %). En immobilier, 4 273 réservations de logements ont été enregistrées contre 5 095 en 2019 (2 410 contre 2 561 au second semestre). Dans la branche Infrastructures, le chiffre d’affaires décroît de - 7 % à 5,99 milliards d’euros. En France il se contracte de - 8,5 %, dont - 13,1 % dans la Route. « Les marges dans ce métier ont bien résisté, observe Benoît de Ruffray, et devraient être préservées par la transition écologique amorcée avec la route du futur et les liants végétaux ». Le CA est en recul de - 6,8 % dans le Génie Civil, maintenu par les niveaux exceptionnels d’activité sur le Lyon Turin et le Grand Paris. Il s’améliore de + 11,9 % dans le Métal, boosté par l’éolien offshore en Europe et plus spécifiquement par le démarrage du chantier éolien de Saint-Nazaire. La branche enregistre, par ailleurs, une baisse plus limitée à l’international de - 3,8 %. Dans la branche Énergie Systèmes, l’activité est en baisse de - 9,5 % à 4,05 milliards d’euros, dont - 10,3 % en France et - 7,7 % à l’international, mais « devrait profiter des dispositifs prévus par le plan de relance ».

Fragilité des concessions
Dans les Concessions, les trafics autoroutiers et aéroportuaires ont été fortement perturbés par la Covid-19 au second semestre du fait du retour de mesures restrictives de déplacement en France, comme dans les pays voisins. Le Stade Pierre Mauroy est resté fermé au public compte tenu des interdictions de rassemblement. L’impact se chiffre à - 620 millions d’euros, dont - 190 millions d’euros sur le deuxième semestre. Le chiffre d’affaires des Concessions s’établit ainsi à près de 2,6 milliards d’euros, en baisse de - 12,7 %. Avec - 67,3 %, le trafic est en chute libre sur les aéroports. « Le démarrage pourtant prometteur de l’activité des aéroports de Lille et Toulouse a été freiné par les importantes turbulences inhérentes à la Covid-19. Le Groupe estime qu’il faudra plusieurs années avant un retour à la normal », indique Benoît de Ruffray. Les concessions autoroutières ne s’en sortent pas beaucoup mieux : les trafics sont en baisse de - 21 % chez APRR, de - 23,9 % sur le viaduc de Millau, et de - 22 % sur l’A65. Avec les deux confinements, c’est environ 90 % du trafic qui a plongé.

Objectif bas carbone
La maîtrise des émissions de carbone n’est pas un vain mot pour Eiffage. En plus de sa note relevée de B à A- dans le classement Climate Change 2020 du CDP (Carbon Disclosure Project), et la création du club industriel Sekoya, Eiffage travaille au verdissement de son parc matériel et de véhicules. « Nous raisonnons par type de machine, explique Benoît de Ruffray. Nous avons vocation à équiper de matériels électriques les opérations dans un cercle au kilométrage peu étendu. Notre flotte routière bénéficiant de ses propres stations de carburant, nous sommes également en mesure de déployer plus massivement des camions alimentés en biocarburant ou biogaz ». Au sein des processus constructifs, les exigences de la RE2020 guident l’innovation. Eiffage fait ainsi état de plusieurs partenariats dédiés au développement poussé de bétons bas carbone. « Technologie et règlementation sont toutes deux vouées à évoluer dans l’intérêt général, poursuit le PDG. Au-delà du bénéfice commun, nous croyons, par ailleurs, que le recyclage des agrégats peut recréer de la valeur dans le matériau issu de la déconstruction et utile à la rénovation. Enfin, nous prévoyons d’améliorer et d’augmenter nos liants biosourcés. Nous nous devons de réussir à industrialiser toutes ces solutions techniques afin de baisser les coûts et améliorer leur efficacité ».
