Créé en 1989, le Grand Prix de l’urbanisme distingue chaque année une personnalité reconnue par un jury international. Il valorise l’action des professionnels qui contribuent à faire avancer la discipline et à améliorer le cadre de vie des habitants de tous les territoires. Cette année, le jury a désigné dès le premier tour Simon Teyssou pour son engagement et son action en faveur des territoires ruraux et péri-urbains. Tête de file d’une génération de concepteurs, il démontre qu’il est possible de réaliser des projets ambitieux, qualitatifs et créatifs dans des territoires faiblement dotés en ingénierie, peu attractifs pour le marché et financièrement contraints. En tant que directeur de l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Clermont-Ferrand il contribue à mettre en visibilité les questions posées par la ruralité, le devenir des petites centralités, la diversité des modes d’intervention possibles, la cohésion sociale, en insistant sur leurs complémentarités avec des territoires urbain voisins. Le jury a voulu saluer ses travaux, sa pensée et son engagement qui mettent à l’honneur ces espaces souvent modestes, parfois les oubliés de l’urbanisme, qui fondent l’identité de la France et se révèlent être des laboratoires sociétaux, urbains et environnementaux. Il ouvre ainsi des voies d’action opérantes et inclusives, qui pourront éclairer utilement les pratiques métropolitaines à l’avenir.
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Influencé par le régionalisme critique, il défend une architecture située et mobilise la question écologique pour en faire une opportunité au service du projet avec une valorisation du « déjà-là », une maitrise de l’empreinte écologique (énergétique, carbone, en biodiversité…), des qualités d’usages, d’évolutivité ou de réversibilité. Ainsi, à Chaliers, il convoque les traces des anciennes pratiques vivrières et le grand paysage pour concevoir la mutation de ce village-rue, tandis qu’à Mandailles, il conçoit une nouvelle halle se référant à l’archétype de la grange-étable cantalienne et étire son dispositif par une passerelle piétonne franchissant la Jordanne renaturée. Cette approche empirique s’enrichit d’une réflexion théorique portée par son activité d’enseignement qui l’amène plus largement à questionner les processus de désaffection / réinvestissement des centres-bourgs (et en corollaire d’étalement urbain) pour mieux y répondre. Avec le collectif « Virage », il construit une méthodologie de projet, ancrée dans le territoire et dont une des clefs de voûtes est un système de résidences et de guichet ouvert au public permettant la mobilisation des élus, des acteurs et des habitants. Au sein de l’école d’architecture de Clermont-Ferrand, il œuvre à mobiliser les futurs architectes sur les territoires ruraux, en considérant que c’est aussi depuis ces espaces singuliers, parfois considérés comme à la marge, que pourront être repensés les outils de demain dans des territoires plus urbains. Dépassant la notion de ruralité, il propose de penser « les » ruralités. Cette triple approche de praticien en milieu rural, de chercheur et d’enseignant ouvre une nouvelle voie de pensée et d’action pour aménager nos territoires. En ce sens, Simon Teyssou est le représentant d’une nouvelle « école » et mérite pleinement le Grand Prix cette année.