Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, nous a accordé une interview dans laquelle il réitère son soutien au secteur de la construction, particulièrement affecté par la crise économique liée au Covid-19. Revenant en détail sur les différentes mesures gouvernementales en faveur des entreprises du BTP, il s’engage à rencontrer les professionnels lors du prochain Intermat. En avant-première, voici les meilleurs extraits de cet entretien à paraître dans BTP Magazine n°330.

C.C.com : Dès le 11 mai dernier, premier jour du déconfinement, vous avez tenu à visiter un chantier à Saint-Germain-en-Laye. Quel était le message que vous vouliez faire passer à cette occasion aux acteurs du BTP?

Bruno Le Maire : J’avais deux messages. Un message de soutien d’abord, car je sais les difficultés qu’a rencontrées le secteur pendant ces semaines de confinement et je sais les efforts endurés pour faire repartir les chantiers en respectant les normes sanitaires. Un message de volonté ensuite, car le secteur doit repartir vite et fort. Il en va de la pérennité des entreprises du BTP mais aussi de la réussite de la relance de notre économie.

J’ai pu constater à Saint-Germain-en-Laye que toutes les conditions étaient réunies pour réussir cette reprise : les protocoles sanitaires étaient définis, et respectés, l’approvisionnement en matériel de protection était assuré et l’ensemble des activités nécessaires à la bonne marche des chantiers avait repris. Depuis cette visite, la reprise dans le BTP s’est accélérée et je m’en réjouis.

C.C.com : A cette occasion, vous avez déclaré que le "secteur de la construction, qui est resté totalement à l’arrêt pendant trois mois est vital pour l’économie française et peut même être un symbole du redémarrage de l’économie française". Alors que la reprise s’engage, avez-vous estimé les conséquences de ces trois mois d’arrêt pour l’économie française et plus spécifiquement pour le BTP? Un effondrement de l’activité au second semestre est-il à craindre comme le craignent certains professionnels?

Bruno Le Maire : Ne cédons pas au catastrophisme.  Il y a des signes très encourageants : la consommation repart, dans de nombreux secteurs elle revient à la normale. Si nous n’avons pas un retour de l’épidémie, la reprise se poursuivra sur le second semestre.

Il est vrai que l’activité de BTP a été très fortement dégradée pendant ces deux mois de confinement. Plus grave encore, nous avons eu en France un taux d’activité très inférieur à celui de nos voisins européens. A la fin avril, la perte d’activité dans le secteur atteignait plus de 80%, alors qu’elle était contenue en dessous de 10 % chez nos voisins allemands. Pourtant, le secteur n’a pas subi de fermeture administrative.

Les chantiers ont maintenant pleinement repris et nous  les accompagnons  pour que cette reprise soit solide et durable. Nous dialoguons quotidiennement  avec les représentants des filières, les collectivités, les organisations et les syndicats afin de lever les freins qui pourraient subsister. Le BTP est un moteur d’emplois, de croissance et un levier essentiel de transition énergétique. Il aura une place importante dans la relance.

C.C.com : Que faut-il attendre du 3ème projet Loi de Finances rectificative (PLFR3) présenté le 10 juin au Conseil des Ministres?

Bruno Le Maire : Il faut en attendre 3 actions principales. D’abord, il soutiendra massivement les secteurs les plus touchés par la crise : le tourisme, l’automobile, l’aéronautique, les entreprises technologiques, la culture…. Au total, 45 milliards d’euros seront dédiés à la relance de ces secteurs.

Ensuite, il débloquera des soutiens pour les jeunes et en particulier pour les apprentis. La prime à l’embauche d’un apprenti sera portée à 8 000 euros pour les jeunes majeurs et à 5 000 euros pour les mineurs.
Enfin, il activera les instruments européens, notamment les financements de la BEI pour soutenir les PME. Les entreprises françaises devraient en bénéficier à hauteur d’environ 40 milliards d’euros. 

Relances sectorielles, soutien aux jeunes, activation des mesures européennes : voilà les trois principales actions de ce projet de loi de finances rectificative.

C.C.com : Le secteur représente 2 millions d’emplois sur le territoire, or, les données de certaines fédérations tendent à dire que 20 % des entreprises seraient prêtes à réduire leurs effectifs. Quelle est la réponse du gouvernement ?

Bruno Le Maire : La réponse, c’est celle que nous avons apportée dès les premiers jours de mars : nous protégerons les emplois et les compétences quoi qu’il en coûte.

La réponse a donc été rapide, massive et efficace. Le BTP en a fortement bénéficié. Le chômage partiel a permis de couvrir près de 13,3 millions de salariés français, dont 1,4 millions dans le BTP. Le fonds de solidarité a versé 4,6 milliards d’euros d’indemnisation pour 3,5 millions de versements aux petites entreprises.

Dans le secteur de la construction, cela représentait une aide de près d’un demi-milliard d’euros, pour plus de 300 000 versements aux entreprises du secteur.  Toujours dans le cadre de cette réponse massive, le prêt garanti par l’Etat a apporté un financement d’urgence à faible coût, pour un montant qui dépasse les 100 milliards d’euros. Dans le secteur du BTP, le PGE a permis d’injecter 8,5 milliards d’euros.

Le BTP a largement trouvé sa part dans la réponse d’urgence mise en œuvre par l’Etat. Après l’urgence doit venir la relance, et je suis convaincu que seule la reprise durable des filières du BTP offrira des perspectives pour l’emploi. Je sais que l’incertitude économique est encore forte pour les professionnels du secteur. Nous travaillons à la dissiper. Un plan de relance général de l’économie sera présenté à la rentrée dans lequel le BTP aura toute sa part.

C.C.com : L’an prochain aura lieu le salon Intermat, à Villepinte, qui est considéré par beaucoup de professionnels comme le salon symbole de la reprise. Beaucoup aimeraient voir un responsable politique s’y rendre pour marquer le soutien de l’Etat à tout un secteur... Quelle réponse leur apporter à cet appel du pied ?

Bruno Le Maire : Comme je vous l’ai déjà dit, le BTP est un secteur essentiel à mes yeux. Si le calendrier le permet, c’est avec grand plaisir que j’irai rencontrer les professionnels de la filière afin de leur réaffirmer mon soutien le plus entier. Dès aujourd’hui, je veux redire mon attachement à tous les Français qui travaillent dans le secteur du BTP. L’Etat a été, est et sera à vos côtés.