Il y a quelques jours, un collectif d’architectes et urbanistes de renom, sortis de leur traditionnelle réserve, s’est insurgé face aux premières images du projet de transformation de la Gare du Nord, à Paris.
Pour mémoire, la SNCF avait lancé une consultation en 2017 visant à transformer la Gare du Nord à l’horizon 2024. Après un an de concertation, opposant cinq projets, Ceetrus (filiale immobilière du groupe Auchan) a été désigné lauréat. Avec 900 000 voyageurs en 2030, cette gare deviendra la première d’Europe. Le projet de Ceetrus prévoit donc un doublement des espaces de circulations et d’attente pour les voyageurs (de 30 000 à 60 000 m2), un nouveau hall de départ symétrique à celui du Transmanche, avec des accès directs à tous les quais (le grand quai transversal historique sera dédié aux arrivées). Quant au Terminal Transmanche aujourd’hui saturé, il sera doublé.
La façade Est affichera un nouveau visage. La façade Nord, sera pour sa part restaurée, de même que la façade intérieure de la grande Halle d’Hittorff, qui retrouvera son état d’origine. Parmi les équipements à signaler, un parc de 11 000 m² accessible à tous en toiture, un parc de stationnement pour vélos de 2 000 places ainsi que 10 000 m² dédiés au pôle de vie culturel et sportif.
Non respect de l’usager et de l’urbanisme
Le projet de 600 M€ fait pousser des hauts cris. Dans une tribune publiée dans le Monde, mardi dernier, 19 grands noms de l’architecture et de l’urbanisme, dont Jean Nouvel, Roland Castro, ou encore Jean-Louis Subileau et Laurent Théry, le qualifient d’"inacceptable". Considérant qu’il doit être "repensé de fond en comble", les signataires prônent plutôt pour une transformation "légère", plus respectueuse de son titre de monument historique.
"Il s’agit d’abord d’une grave offense aux usagers du transport, s’expliquent les détracteurs dans Le Monde. Le premier objectif d’une réorganisation de la gare doit être de leur offrir un lieu et un moment d’échanges aussi confortables que possible, dans des parcours quotidiens souvent harassants. Obliger des centaines de milliers de personnes à traverser des espaces commerciaux devient insupportable lorsque ce cadeau au commerce se paie de parcours allongés et inutilement compliqués." Car le projet prévoit d’interdire l’accès direct aux quais tel qu’il se pratique aujourd’hui.
Dans un autre registre, les architectes et urbanistes estiment que le projet est aussi "une grave erreur urbaine". "Implanter une telle masse de commerces et d’activités à la gare du Nord, dans un ensemble fermé sur lui-même, dans une zone déjà saturée de trafic, à une station de RER de Saint-Denis, cœur de l’agglomération des neuf villes de Plaine Commune, est une atteinte à la volonté de rééquilibrer les activités dans Paris, et plus encore dans l’espace du Grand Paris", affirment-t-ils.
Reste qu’un tel chantier risque de mettre à mal le planning de StatioNord, société en charge du projet. Handicapée par un avis défavorable rendu cet été par une commission spécialisée dans l’aménagement commercial sur une partie du projet, pour lequel un permis de construire a été bloqué, elle a fait appel. Nonobstant, un retard de livraison est à prévoir et pourrait "perturber le fonctionnement de la gare en plein JO 2024".
Crédit photo : Gerhard Bögner/Pixabay
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