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[SCOOP] P95T de Colas Rail : un devers de folie

Par CB. Publié le 14 septembre 2020.
[SCOOP] P95T de Colas Rail : un devers de folie
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Œuvrant depuis juin sur le chantier RB/RT de la LGV SEE, le groupement emmené par Colas Rail était rentré dans le vif du sujet lors de notre reportage chantier début septembre. Car il faut avoir les nerfs solides pour engager un train de coupe dans une section présentant un devers de 180 mm, puis filer en courbe sur 580 m avant la restitution impérative de la voie circulable au matin à 120 km/h. Vertigineux !

Il est 23h et nous venons de quitter Tonnerre où se trouve la base vie de Colas Rail. Une demi-heure auparavant, le préventeur HSE nous avait fait émarger le registre après avoir expliqué en détail les consignes de sécurité applicables sur ce chantier si particulier. Puis il a fallu enfiler les EPI – chaussures de sécurité, masque, lunettes, bouchons d’oreilles, casque, chasuble jusqu’au pantalon de travail haute visibilité – et se mettre en route pour aller à la rencontre du train de coupe P95 T parti de la base travaux de Saint Florentin où il a été approvisionné en journée à côté de la dégarnisseuse-cribleuse RM 900SF de TSO. En tête du convoi, on trouve Damien Rose, directeur de projet Colas Rail et son copilote Fabien Gosselin, directeur travaux. Pleins phares, la voiture qui sinue sous la pleine lune dans les vallons de cette belle campagne tonnerroise sert de repère à Jean-François Milleron, directeur général adjoint France Colas Rail et à Pierre-Gilles Douriez, directeur régional France, puis à Lionel Cerri et Philippe Boetti de Matisa France qui n’auraient raté sous aucun prétexte ce chantier de renouvellement RB/RT inédit. Le premier à l’échelle mondiale à embarquer une organisation de type suite rapide sur une ligne à grande vitesse exploitée. Un chantier effectué 100 % de nuit, rendant les voies chaque matin à la circulation à 120 km/h et n’admettant aucune restitution tardive sous peine de pénalités de retard colossales.
Le ton est donné ? Pas tout à fait non, car il faut savoir aussi que sur ces terres réputées pour ses vignobles de Chablis, le train de travaux de 730 m de long va devoir encaisser des devers de 180 mm et des pentes allant jusqu’à 35 ‰, soit un gap en hauteur de 25 m entre ses deux extrémités ! S’ajoutant à l’obligation de remettre en place le rail au même niveau (+/- 30 mm), ces contraintes techniques ont donné du fil à retordre au groupement mené par Colas Rail et embarquant TSO, TSO Caténaires, Colas Rail Sécurité ferroviaire et FVF. Tout comme au constructeur Matisa qui a dû rajouter, pour répondre à ce cahier des charges si particulier, quelques essieux moteurs au P95 T (10 au total) ainsi qu’une chaîne d’excavation pour maîtriser l’altitude de pose des nouvelles traverses.
« Il y a quand même un ou deux avantages à travailler sur une ligne lgv, comme celui de manipuler des traverses et attaches homogènes et d’avoir beaucoup moins de surprises sous le ballast » ironise Damien Rose avant d’ajouter que ce marché clé en main de 4 campagnes sur 4 ans comprend 153 km de RB/RT, le réglage caténaire et la dépose/repose des installations chaque nuit (balises, condensateurs, détecteurs…), mais également un nombre élevé de prestations de sécurité (perchage caténaire, conduite autonome et manœuvre des installations de sécurité en base arrière, l’annonce des circulations, des missions d’agents prestataires LAM et S9 et d’agents accompagnants (percheurs, APS9, topographes).

De 500 à 700 m chaque nuit
Le groupe arrive enfin sur zone, mais non sans avoir auparavant effrayé un sanglier dans la force de l’âge sarclant un champ de maïs. Après un deuxième brief sécurité, notre équipe longe l’enceinte grillagée protégeant l’emprise de la ligne pour rejoindre un accès technique en bas du talus. Le train de coupe illuminé mais silencieux nous surplombe alors d’une dizaine de mètres. D’où nous sommes, nous apercevons la rame d’approvisionnement fournie par le groupement. « Elle est composée de wagons WT16 chargés chacun de 192 traverses (2 fois 4 lits de 24) disposées dans le sens de pose » explique Damien Rose. On le croit sur parole, car pour l’instant, le chargement est encore sécurisé latéralement par les rideaux métalliques escamotables qui préviennent l’engagement du gabarit durant les phases de transport.
Arrivés en haut du talus, il nous faut encore monter sur la plateforme éclairée par nos frontales et longer la voie qui repose sur un lit de ballast tout propre. La section a en effet été le théâtre, deux jours plus tôt, des opérations de dégarnissage-criblage menées par TSO. Nous approchons enfin du monstre de métal. D’un poids de 230 t et d’une longueur de 93,12 m, le P95T est composé de 4 châssis : le wagon à entrainement supplémentaire (WES), le wagon manutention (WM), le wagon force (WF) et le wagon force détaché (WFD). « Le wagon WES est utilisé pour le transport de petits matériels et pour les opérations de débouclage de la voie, tout en permettant l’accès au portique via une échelle pivotante sous châssis »précise Lionel Cerri.
Le WM est quant à lui utilisé pour le stockage provisoire des traverses anciennes et l’approvisionnement en traverses neuves, ainsi que pour le ramassage des semelles. Le portique de manutention de traverses, verrouillé sur le WES lors des acheminements, se chargeant de mettre en stock provisoire les vieilles traverses sur les WT16 et de revenir chargé d’un lit de 24 traverses neuves disposées transversalement à la voie. « Il n’y a donc plus de retournement des traverses entre le stockage sur les wagons de transport et la cassette de pose ce qui améliore le rendement du train » insiste le directeur de projet.
A propos de rendement, il n’est pas inutile de rappeler ici que ce qui limite la vitesse d’avancement d’un train de coupe, son goulot d’étranglement donc, ce sont les opérations de transferts des traverses entre les rames blocs et la zone de palettisation. Plus celles-ci sont rapides et plus le rendement du train est susceptible d’être à son optimum. On peut se demander alors pourquoi Colas Rail n’a pas équipé son train de deux portiques pour aller encore plus vite ? « Tout simplement parce que, sur ce chantier, l’objectif maximal imposé par notre client SNCF Réseau est le renouvellement de 700 m de voie chaque nuit, ce qui correspond à un peu moins de 1 200 traverses, soit six wagons WT16 à parcourir dans les deux sens dans le pire des cas. Cette distance peut largement être faite par un seul portique avant que ne soient posées toutes les nouvelles traverses » répond Fabien Gosselin. « Ce train est d’ailleurs modulable et rien n’empêche d’ajouter un deuxième portique lors de chantiers demandant des linéaires de RT plus importants » renchérit Lionel Cerri.

Un train évolutif
Evolutif, ce nouveau P95T l’est assurément. Pour s’en convaincre, attardons-nous sur le groupe de travail qui relie le WM et le WF via une poutre articulée : le fameux cigare et la non moins renommée tête d’éléphant ! Ce groupe, le cœur du P95T, est constitué de la fourche de dépose des vieilles traverses (VT) reconnaissable à ses deux paires de cornes, du dispositif d’excavation de 200 m3/h à double écartement, de la charrue dynamique et enfin de la cassette de pose également à double écartement. « Ce train a en effet été conçu pour opérer en RT sur LGV, mais on peut également imaginer l’utiliser en RT/RR sur d’autres chantiers de type lignes fermées » nous apprend Pierre-Gilles Douriez directeur régional France de Colas Rail. Sur lignes classiques, le train est alors modifié pour présenter un front d’attaque de 2 810 mm et traiter des traverses bois, béton et bi-blocs de 2 600 mm. En revanche, l’écartement est plus faible lors du travail sur LGV pour limiter le rayon du rail et les efforts sur celui-ci (1) (front d’attaque de la chaîne de 2 600 mm max. pour des traverses de 2 422 mm max).

La substitution des traverses
Au niveau du groupe de travail, les compagnons sont désormais dans le dur. Ils viennent de finir le trou de pioche au droit duquel s’est positionné le P95T et font riper trois traverses pour permettre la mise en place de la fourche de dépose. Pendant ce temps minuté, une équipe procède au tronçonnage des files de rails à 25 traverses derrière la zone d’engagement pour créer une zone de respiration et les fixer au train plus facilement, puis les éclissent temporairement : ils seront soudés par aluminothermie dès que l’arrière du train de coupe aura dépassé la zone. Au signal de la trompe, le train se met enfin en branle pour s’arrêter aussitôt ! En raison du devers de 180 mm, les opérateurs peinent à engager la cassette de pose dans la fosse. Ordre est donné de passer en mode manuel pour espérer atteindre au plus vite les cotes de profondeur établies selon les directives de la MOE Travaux : « Cette opération est cruciale car il en va de la bonne conformité du régalage de la sous-couche de ballast et de la maîtrise de l’altitude de pose de la nouvelle voie » explique Damien Rose, nullement impressionné. Le chef d’équipe lui donne d’ailleurs rapidement raison en lançant le signal de départ du train après un dernier coup d’œil à la règle à niveau. Défilent alors devant nous, le tapis de ballast, les cabines de travail, les pinces rails, le chariot fastclip, puis le WFD qui supporte l’automate et le compartiment moteur et enfin un wagon de type Wacad qui déverse dans les cases le ballast issu de la chaine d’excavation. Derrière piaffent déjà les engins de relevage et de stabilisation pour restitution à 120 km/h, ainsi que la régaleuse qui assurera la mise en conformité des profils. Et enfin à l’aube, les premiers trains de voyageurs qui fileront vers la capitale et celle de la Gaule.
 
 
(1) Le P95T a d’ailleurs été dessiné de telle sorte qu’il pourrait réaliser la substitution des traverses sans coupe de rails !
 

 
©BTPRail
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